Connaissez-vous quelqu’un qui semble devenir une victime dans presque toutes les situations ? Il est possible qu’elle ait une mentalité de victime, parfois appelée syndrome de la victime ou complexe de la victime.
La mentalité de victime repose sur trois croyances clés:
- Les mauvaises choses arrivent et continueront d’arriver.
- Les autres personnes ou les circonstances sont à blâmer.
- Tout effort pour créer un changement échouera, il est donc inutile d’essayer.
L’idée de la mentalité de victime est souvent évoquée dans la culture pop et dans les conversations ordinaires pour désigner les personnes qui semblent se complaire dans la négativité et l’imposer aux autres.
Ce n’est pas un terme médical officiel. En fait, la plupart des professionnels de la santé l’évitent en raison de la stigmatisation qui l’entoure.
Les personnes qui se sentent piégées dans un état de victimisation expriment souvent beaucoup de négativité, mais il est important de réaliser qu’une douleur et une détresse importantes alimentent souvent cet état d’esprit.
Vicki Botnick, thérapeute conjugale et familiale agréée (LMFT) à Tarzana, en Californie, explique que les gens s’identifient au rôle de victime lorsqu’ils « se mettent à croire que tout le monde est à l’origine de leur malheur et que rien de ce qu’ils font ne changera jamais rien »
Ils se sentent alors vulnérables, ce qui peut entraîner des émotions et des comportements difficiles. Voici quelques-uns de ces comportements.
Eviter les responsabilités
L’un des principaux signes, selon Botnick, est le manque de responsabilité.
Il peut s’agir de :
- jeter le blâme ailleurs
- faire des excuses
- ne pas prendre ses responsabilités
- réagir à la plupart des obstacles de la vie en disant « Ce n’est pas ma faute »
Les mauvaises choses arrivent vraiment, souvent à des personnes qui n’ont rien fait pour les mériter. Il est compréhensible que les personnes confrontées à des difficultés successives commencent à croire que le monde leur veut du mal.
Mais de nombreuses situations font appel à divers degrés de responsabilité personnelle.
Pensons à la perte d’un emploi, par exemple. Il est vrai que certaines personnes perdent leur emploi sans raison valable. Il est également fréquent que certains facteurs sous-jacents jouent un rôle.
Une personne qui ne tient pas compte de ces raisons risque de ne pas tirer de leçons ou d’évoluer à partir de cette expérience et de se retrouver à nouveau dans la même situation.
Ne pas chercher de solutions possibles
Toutes les situations négatives ne sont pas totalement incontrôlables, même si elles semblent l’être au départ. Souvent, il y a au moins une petite action qui pourrait mener à une amélioration.
Les personnes qui viennent d’un lieu de victimisation peuvent montrer peu d’intérêt à essayer de faire des changements. Elles peuvent rejeter les offres d’aide et donner l’impression qu’elles ne cherchent qu’à s’apitoyer sur leur sort.
Passer un peu de temps à s’apitoyer sur son sort n’est pas nécessairement malsain. Cela peut aider à reconnaître et à traiter les émotions douloureuses.
Mais cette période doit avoir une fin précise. Après cela, il est plus utile de commencer à travailler à la guérison et au changement.
Un sentiment d’impuissance
Beaucoup de personnes qui se sentent victimes croient qu’elles n’ont pas le pouvoir de changer leur situation. Elles n’aiment pas se sentir abattues et aimeraient que les choses aillent bien.
Mais la vie continue à leur imposer des situations que, de leur point de vue, elles ne peuvent rien faire pour réussir ou fuir.
« Il est important de faire la différence entre « ne pas vouloir » et « ne pas pouvoir » », explique Mme Botnick. Elle explique que certaines personnes qui se sentent victimes choisissent consciemment de rejeter la faute sur autrui et de se sentir offensées.
Mais dans sa pratique, elle travaille plus souvent avec des personnes qui souffrent de douleurs psychologiques profondes qui font que le changement semble vraiment impossible.
Le discours négatif et l’auto-sabotage
Les personnes qui ont une mentalité de victime peuvent intérioriser les messages négatifs suggérés par les défis auxquels elles sont confrontées.
Le sentiment d’être victime peut contribuer à des croyances telles que :
- « Tout ce qui est mauvais m’arrive. »
- « Je ne peux rien y faire, alors pourquoi essayer ? »
- « Je mérite les mauvaises choses qui m’arrivent. »
- « Personne ne se soucie de moi. »
Chaque nouvelle difficulté peut renforcer ces idées négatives jusqu’à ce qu’elles soient fermement ancrées dans leur monologue intérieur. Au fil du temps, ce discours négatif peut nuire à la résilience, ce qui rend plus difficile le fait de rebondir après une épreuve et de guérir.
Le monologue intérieur négatif va souvent de pair avec l’auto-sabotage. Les personnes qui croient en leur discours ont souvent plus de facilité à le mettre en pratique. Si ce discours est négatif, elles sont plus susceptibles de saboter inconsciemment toutes les tentatives qu’elles pourraient faire pour changer.
Le manque de confiance en soi
Les personnes qui se considèrent comme des victimes peuvent avoir du mal à avoir confiance en elles et à s’estimer. Elles peuvent penser à des choses comme « Je ne suis pas assez intelligent pour obtenir un meilleur emploi » ou « Je ne suis pas assez talentueux pour réussir » Cette perspective peut les empêcher d’essayer de développer leurs compétences ou d’identifier de nouvelles forces et capacités qui pourraient les aider à atteindre leurs objectifs.
Ceux qui essaient de faire ce qu’ils veulent et qui échouent peuvent se considérer une fois de plus comme des victimes des circonstances. Le regard négatif qu’elles portent sur elles-mêmes peut les empêcher d’envisager d’autres possibilités.
Frustration, colère et ressentiment
Une mentalité de victime peut nuire au bien-être émotionnel.
Les personnes qui ont cet état d’esprit peuvent se sentir :
- frustrées et en colère contre un monde qui semble contre elles
- sans espoir de voir leur situation changer
- blessées lorsqu’elles croient que leurs proches ne se soucient pas d’elles
- représentatives des personnes qui semblent heureuses et qui réussissent
Ces émotions peuvent peser lourdement sur les personnes qui croient qu’elles seront toujours des victimes, s’accumulant et s’envenimant lorsqu’elles ne sont pas prises en compte. Au fil du temps, ces sentiments peuvent contribuer à :
- des accès de colère
- la dépression
- l’isolement
- la solitude
Très peu de personnes – voire aucune – adoptent une mentalité de victime simplement parce qu’elles le peuvent. Pour une personne extérieure, une mentalité de victime peut sembler exagérément dramatique. Mais cet état d’esprit se développe souvent en réponse à une véritable victimisation.
Il peut apparaître comme une méthode pour faire face à des abus ou à des traumatismes. Le fait d’être confronté à une succession de circonstances négatives peut rendre ce résultat plus probable.
Toutes les personnes qui vivent des situations traumatisantes ne développent pas une mentalité de victime, mais les gens réagissent à l’adversité de différentes manières. La douleur émotionnelle peut perturber le sentiment de contrôle d’une personne, contribuant à un sentiment d’impuissance jusqu’à ce qu’elle se sente piégée et abandonne.
L’abus de confiance
L’abus de confiance, en particulier les trahisons répétées, peut également amener les gens à se sentir victimes et à avoir du mal à faire confiance à qui que ce soit.
Si votre principal fournisseur de soins, par exemple, a rarement respecté ses engagements envers vous lorsque vous étiez enfant, vous risquez d’avoir du mal à faire confiance aux autres par la suite.
Codépendance
Cet état d’esprit peut également se développer parallèlement à la codépendance. Une personne codépendante peut sacrifier ses objectifs pour soutenir son partenaire.
En conséquence, elle peut se sentir frustrée et rancunière de ne jamais obtenir ce dont elle a besoin, sans reconnaître son propre rôle dans la situation.
Manipulation
Certaines personnes qui adoptent le rôle de victime peuvent sembler aimer blâmer les autres pour les problèmes qu’elles causent, s’emporter et culpabiliser les autres, ou manipuler les autres pour obtenir de la sympathie et de l’attention.
Mais, selon Botnick, un tel comportement toxique est plus souvent associé à un trouble de la personnalité narcissique.
Il peut être difficile d’interagir avec une personne qui se considère toujours comme une victime. Elle peut refuser d’assumer la responsabilité de ses erreurs et rejeter la faute sur les autres lorsque les choses tournent mal. Il se peut qu’elle ait toujours l’air de s’en vouloir.
Mais rappelez-vous que de nombreuses personnes vivant dans cet état d’esprit ont été confrontées à des événements de vie difficiles ou douloureux.
Cela ne signifie pas que vous devez prendre la responsabilité de ces personnes ou accepter les accusations et les reproches. Mais essayez de laisser l’empathie guider votre réponse.
Évitez les étiquettes
Les étiquettes ne sont généralement pas utiles. le terme « victime » est particulièrement chargé. Il est préférable d’éviter de qualifier quelqu’un de victime ou de dire qu’il se comporte comme une victime.
A la place, essayez (avec compassion) d’évoquer des comportements ou des sentiments spécifiques que vous avez remarqués, tels que:
- complaintes
- rejeter la faute
- ne pas accepter la responsabilité
- se sentir piégé ou impuissant
- sentir que rien ne change
Il est possible qu’en entamant une conversation, la personne ait l’occasion d’exprimer ses sentiments d’une manière productive.
Fixez des limites
La mentalité de victime est en partie stigmatisée par la façon dont les gens blâment parfois les autres pour leurs problèmes ou les culpabilisent pour les choses qui n’ont pas fonctionné.
« Vous pouvez vous sentir constamment accusé, comme si vous marchiez sur des œufs, ou devoir vous excuser pour des situations où vous vous sentez tous les deux responsables », dit Botnick.
Il est souvent difficile d’aider ou de soutenir une personne dont le point de vue semble très différent de la réalité.
Si la personne semble porter des jugements ou des accusations à votre égard et à l’égard des autres, il peut être utile de fixer des limites, suggère Mme Botnick : « Détachez-vous autant que possible de leur négativité et redonnez-leur la responsabilité
Vous pouvez toujours avoir de la compassion et de l’attention pour quelqu’un même si vous devez parfois vous éloigner de lui.
Offrez votre aide pour trouver des solutions
Vous voudrez peut-être protéger votre proche des situations dans lesquelles il pourrait se sentir encore plus victime. Mais cela peut épuiser vos ressources émotionnelles et aggraver la situation.
Une meilleure option peut consister à offrir votre aide (sans rien régler pour lui). Vous pouvez le faire en trois étapes :
- Confirmez qu’ils croient qu’ils ne peuvent rien faire pour changer la situation.
- Demandez-leur ce qu’ils feraient s’ils avaient le pouvoir de faire quelque chose.
- Aidez-les à réfléchir à des moyens possibles d’atteindre cet objectif.
Par exemple : « Je sais qu’il semble que personne ne veuille vous embaucher. Cela doit être très frustrant. À quoi ressemble votre emploi idéal ? »
En fonction de sa réponse, vous pourriez l’encourager à élargir ou à restreindre sa recherche, à envisager différentes entreprises ou à essayer d’autres domaines.
Offrez des encouragements et une validation
Votre empathie et vos encouragements ne mèneront peut-être pas à un changement immédiat, mais ils peuvent tout de même faire une différence.
- souligner ses qualités
- souligner ses réussites
- rappeler son affection
- valider ses sentiments
Les personnes qui n’ont pas de réseau de soutien solide ni de ressources pour les aider à faire face à un traumatisme peuvent avoir plus de mal à surmonter leur sentiment de victimisation ; encourager votre proche à parler à un thérapeute peut donc aussi l’aider.
Considérez d’où elles viennent
Les personnes qui ont une mentalité de victime peuvent :
- se sentir désespérées
- croire qu’elles manquent de soutien
- se blâmer elles-mêmes
- manquer de confiance en soi
- avoir une faible estime de soi
- se débattre avec la dépression et le SSPT
Ces sentiments et expériences difficiles peuvent accroître la détresse émotionnelle, ce qui rend la mentalité de victime encore plus difficile à surmonter.
La mentalité de victime n’excuse pas les mauvais comportements. Il est important de se fixer des limites. Mais il faut aussi comprendre qu’il peut y avoir beaucoup plus que le simple fait qu’ils veuillent attirer l’attention.
« Se sentir blessé de temps en temps est une indication saine de notre valeur personnelle », dit Botnick.
Mais si vous pensez que vous êtes toujours victime des circonstances, que le monde vous a traité injustement ou que tout ce qui va mal est de votre faute, le fait de parler à un thérapeute peut vous aider à reconnaître d’autres possibilités.
Il est conseillé de parler à un professionnel qualifié si vous avez été victime d’abus ou d’autres traumatismes. Si un traumatisme non traité peut contribuer à un sentiment persistant de victimisation, il peut aussi contribuer à :
- la dépression
- les problèmes relationnels
- une série de symptômes physiques et émotionnels
Un thérapeute peut vous aider :
- explorer les causes sous-jacentes de la mentalité de victime
- travailler sur l’autocompassion
- identifier les besoins et les objectifs personnels
- créer un plan pour atteindre les objectifs
- explorer les raisons derrière les sentiments d’impuissance
Une mentalité de victime peut être pénible et créer des difficultés, tant pour les personnes qui en sont atteintes que pour leur entourage. Mais elle peut être surmontée avec l’aide d’un thérapeute, ainsi qu’avec beaucoup de compassion et de bienveillance.